En Grèce déjà, les philosophes cyniques prémunissaient leurs concitoyens contre les méfaits de la civilisation. Et Jean-Jacques Rousseau, à son tour, glorifie l'état de nature face à la société corruptrice. La nature sauvage de l'homme reste aujourd'hui une réalité à laquelle chacun peut revenir pour s'y reposer, ainsi qu'un rempart contre toutes les aliénations. (JG)
Approche linguistique. Définitions, synonymie etc...
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Rester, être, devenir
Rester : "Se maintenir, continuer à être dans la même position, le même état" (Dictionnaire Larousse)
sauvage brut farouche solitaire naturel animal barbare grossier abrupt fauve inculte ombrageux féroce retiré abandonné agreste anthropophage âpre atroce à l'écart bestial brute butor cannibale carnassier casanier champêtre craintif cruel désert désolé distant dur ermite féroce fauve fier fruste gothique goujat grossier hagard hérissé hirsute illégal illicite impitoyable inapprivoisé inapprivoisable incivilisé indompté infréquenté inhabité inhospitalier inhumain insociable insoumis intraitable irrégulier loup-garou méchant mal élevé mal dégrossi mal embouché malotru marron misanthrope mufle ostrogoth ours primitif redoutable retiré rustaud rustique rustre sanglant sanguinaire seul spontané timide triste truculent tudesque violent
Chaque synonyme (d'après un site de synonymes sur internet, mais "redoutable" est-il réellement un synonyme de "sauvage" ? ) du mot sauvage nous en dit une facette, une possibilité (mais non une nécessité), en même temps que celui-ci garde un sens particulier, spécifique, unique. Peut-être qu'en passant par la théorie mathématique des ensembles nous y verrions plus clair. Dire que quand je dis "sauvage", je dis selon les cas farouche, solitaire, naturel, animal... revient à pointer l'imprécision du langage qui consiste à appliquer des catégories (langage = forme) préconçues à des réalités toujours uniques. Cette fonction "analogique" est en même temps ce qui fait la force du langage. Trouver le mot juste.
Indompté
Etymologie : sauvage : sylvaticus : forestier
Rester en vie, Rester nous-mêmes, Ce qu'il nous reste
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Ce qu'il nous reste à : vivre, trouver, faire, ne pas faire, découvrir, concevoir... chanter, danser (Vous avez chanté tout l'été, et bien dansez maintenant), boire, fumer, avaler, manger, essayer, réussir, rater.
Grêve sauvage, Camping sauvage, Affichage sauvage, Capitalisme sauvage : "Qui s'organise en général spontanément en dehors des lois et règlements" (Dictionnaire Larousse). Le synonyme qui conviendrait serait "illicite"
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Wittgenstein : "Don't ask for meaning, ask for use."
Définir un terme est impossible, chaque terme comporte plusieurs sens, il y a une famille de sens pour chaque terme. De plus, chaque mot est lié à l'histoire de son utilisation, aux sens et aux nuances qui lui ont été associés. Le sens du terme est à rechercher dans son usage.
(JG)
Arpenter, cartographier
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L'état de nature contre la civilisation etc. La référence à l'origine, à la nature sauvage de l'homme occupe une place culturelle, un topos que nous pouvons arpenter (voire cartographier), comme un paysan arpente sa terre. Des clips publicitaires auxquels nul n'échappe jusqu'à la meilleure littérature et à la meilleure philosophie, ce thème a été traité, pour ne pas dire ressassé. (JG)
Rester sauvage / Non-faire
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L'intention ici est de faire interagir (collision) à titre expérimental ces deux concepts que sont celui de rester sauvage et celui de non-faire.
Texte1 :
"Les animaux, les arbres, ne font rien à part vivre, croître en harmonie avec la nature. C'est un fait que le wu-wei (concept taoïste de l'action sans effort) intègre en cela qu'il recommande aux hommes de suivre l'enseignement des arbres, par exemple. Autrement dit, rester sauvage, pour un individu, peut vouloir dire observer la nature, une rivière qui coule par exemple (sans effort, en suivant la plus grande pente...), et en tirer des enseignements, pour régler sa conduite."
On peut considérer ce court texte (quelques lignes) comme une première émergence, ce qui m'est venu à l'esprit premièrement, lorsque j'ai convoqué dans mon esprit les deux concepts que sont rester sauvage et non-faire. On peut déjà dire qu'il s'agit d'une expérience de pensée (comme Einstein faisait des expériences de pensées) qui consiste à se rendre présent au lien entre deux concepts et à inventer (écrire) en conséquence.
On pourrait essayer autre chose :
Texte 2 :
"Vous demandez-vous parfois ce que fait une biche toute la journée ?"
On peut considérer le texte 1 comme un court "essai" d'élucidation, d'élaboration d'une pensée didactique à partir des connaissance philosophiques de son auteur. Le texte 2 au contraire, se présente sous la forme d'un koan (j'emprunte ici au bouddhisme zen), c'est à dire une condensation (le terme de condensation est important). Les deux textes, le texte 1 et le texte 2, ont finalement le même sens, ou un sens très proche, pourtant, mais l'un a été obtenu à partir d'un effort (paradoxal quand il s'agit de parler de l'action sans effort !) de théorisation (c'est le mot), alors que l'autre m'est apparu, presque concomitemment d'ailleurs, spontanément. Il a fallut l'un pour avoir l'autre. A près coup, on peut traiter le texte 1 comme un préalable, voire une scorie, alors que le texte 2 est une réelle invention (que d'ailleurs je pourrai traiter comme un koan, en y réfléchissant par exemple, dans l'avenir) et à mon sens a beaucoup plus de valeur. Le texte 1 est laborieux (au sens de travail), le texte 2 est sans effort. L'un cherche à montrer, l'autre montre en cachant. Encore une fois, il a fallu le texte 1 pour avoir le texte 2. Vertu de l'effort, vertu du sans effort.
Texte 3 :
Continuons, dans l'idée de nous laisser porter par ce qui s'est passé là. Vertu de l'effort, vertu du sans effort. L'effort peut avoir une vertu, à condition de ne pas forcer la situation (c'est l'enseignement du wu-wei). En l'occurrence, cet effort a été un "préalable" ou une "condition" pour arriver à un état je dirais de "mariage" avec la matière philosophique. Se mettre en état, transformer la matière comme un potier travaille en ne faisant qu'un avec la terre qu'il malaxe. Après l'effort, on arrive au sans effort. Vivre consiste pour nous à "mélanger" les deux. Dualyse de l'effort et du sans effort.
Le texte 3 s'est écrit, déjà, dans un état de grande fluidité, beaucoup plus qu''au début de l'expérience (texte 1). Cette écriture témoigne elle-même, pour moi, d'un "alliage" entre effort (le début du texte 3 : "ne pas forcer la situation") et sans effort (la découvrerte du terme de mariage, et la suite), ou entre didactique et spontané, dans le processus d''écriture-même.
Continuons : "alliage" = dualyse. Le "canon" non-philosophique (j'emploie ce terme à dessein) définit la dualyse comme la mise en évidence de l'alliage des opposés ou des contraires dans les concepts philosophiques. Autrement dit "faire le lien". Ici : effort/sans effort. On pourrait à titre expérimental ou provisoire parler de dialectique entre effort et sans effort. Dans nos vies, nous passons de l'état d'effort à l'état de sans effort et vice versa. L'un est la négation de l'autre, mais la négation de l'un par l'autre aboutit à un dépassement.
La formule "Vertu de l'effort, vertu du sans effort" peut elle aussi apparaître comme un point d'aboutissement, un koan (chez Dogen, on arrive à une généralisation du koan). Quel est le lien entre cette formule et le concept de dialectique ? Dans cette formule, on applique le même terme "Vertu de" aux deux versants de la dualyse : effort et sans effort. On les symétrise ou plutôt on leur applique un vecteur.
Texte 4 :
On pourrait continuer : "Quand l'effort paraît vain, passer au sans effort".
A nouveau avec le texte 4, on invente un koan (pour parler en termes non-philosophiques on unilatéralise) tout en opérant une dualyse (faire apparaître le lien).
Etc etc
Conclusion : Le texte que vous venez de lire m'apparaît après coup comme une certaine dérive qui, en partant d'une expérience donnée (faire collisionner deux concepts), aboutit à des données je dirais de manière provisoire autres. En tout cas, il a pour résultat une certaine invention et des découvertes, dans le champs de recherche que je me suis donné de manière plus large. Pour reprendre le terme de vertu, je dirais vertu de l'écriture, comme il y a une vertu de la lecture.
(Julien Guerraz)
Rester sauvage / Théorie de la solution
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L'idée est de parler du concept de solution en tant qu'il est omniprésent dans nos vies (observation par Miguel Benasayag, entre autre, que nous avons tendance en permanence à chercher des solutions...) et de le collisionner avec notre concept de rester sauvage.
Texte 1 (01/09/2025):
"
Quand on évoque l'idée de rester sauvage, on peut en premier lieu prendre cet adage pour une solution, c'est à dire ayant possiblement une certaine utilité dans nos vies, pour régler notre conduite. Pour contrecarrer ou annihiler la suffisance de cette décision philosophique, on pourrait en chercher l'inverse, ou le contraire. On pourrait dire :
Tirer le meilleur de la civilisation
Autre solution, qui en soi est équivalente (François Laruelle a posé en son temps l'équivalence des positions philosophiques). On peut traiter cette nouvelle proposition comme une découverte dans la mesure où elle semble bien loin de notre idée de départ et que l'explorer peut donc nous être utile. On pourrait dire :
Ce qu'il y a de positif dans le fait d'être civilisé. Valoriser ce positif dans nos vies. Valoriser la civilisation. Cette dernière idée pourra nous servir (à sa manière) de guide pour régler nos conduites de manière inventive et réfléchie.
Mixte civilisation / sauvagerie : autre manière d'entremêler civilisation et sauvagerie, dire : accomplir la civilisation en revenant à notre part sauvage.
Tentative d'élucidation : Avec la post-modernité, la civilisation a abouti d'une certaine manière à sa propre négation. D'où l'idée qu'elle peut puiser dans son autre, dans la part sauvage de l'homme, pour se régénérer, se corriger de sa volonté hégémoniquement civilisatrice.
Auto-dépassement de la civilisation par le sauvage (koan). C'est peut-être ce à quoi nous assistons.
"
(Julien Guerraz)
Je garderai (entre autre) du Shôbôgenzô Tome 1 les expressions suivantes :
- La nature : ce qui advient spontanément
- Les notions de pure spontanéité et de non-agir, notions tournées vers l'état originel de fusion et de non-dépendance totale. (JG)
L'homme est déjà sauvage
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L'expression "rester sauvage" implique que l'homme a déjà cette qualité, d'être sauvage. Or, si l'on s'en tient à l'absolu des définitions, dire "L'homme est sauvage" est un non-sens. On pourrait dire que l'homme n'est ni sauvage, ni civilisé, ce qui serait déjà mieux, ou que c'est dans "l'entre" sauvagerie et civilisation que se situe l'homme. En même temps et sur un autre plan, dire "L'homme est sauvage" s'entend. On peut dire "L'homme est un animal sauvage". Ressource vs Vérité. (JG)
"Into the wild" à l'aveugle, de la possibilité d'un travail théorique
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Je tente ici une expérience : parler du film Into the wild (1996, Sean Penn) sans voir le film lui-même ni sa bande annonce et en me basant sur quelques pages web. Je commencerai par deux pages web : la page wikipedia française du film et un article sur le film, trouvé sur le site de Télérama.
Commençons par l'argument principal du film : Christopher McCandless quitte tout pour rechercher la solitude dans la nature, ce qui le mène jusqu'en Alaska où il mourra. Quelques temps avant de mourir, il réalise que "le bonheur n'est réel que lorsqu'il est partagé". Cette courte présentation du film évoque deux concepts : le concept de recours au sauvage et le concept de solitude.
On pourrait faire l'hypothèse que ce film est une "superposition" de ces deux concepts sous leur forme ondulatoire (j'utilise ici l'idée de "concept d'ondulatoire" tel que définit par François Laruelle dans son livre Philosophie non-standard). Superposition : combinaison, mariage, alliage. Le film en lui-même est l'illustration de cet alliage de deux concepts.
Ce film est l'adaptation cinématographique du récit Voyage au bout de la solitude (Into the Wild pour le titre original), écrit par Jon Krakauer en 1996, et relatant l'histoire réelle de Christopher McCandless. On peut donc dire que ce livre est une autre illustration voisine du mariage des deux concepts en question.
Par ailleurs, on peut trouver d'autres objets culturels tels que livres et films, voire chansons, qui illustrent cette superposition. Je pense par exemple au livre Walden ou la vie dans les bois de H.D. Thoreau : dans ce livre, l'auteur relate son séjour dans la forêt de son ami et mentor Ralph Waldo Emerson, où il habita une cabane durant deux ans...
(A suivre, JG)